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Si Kazimierz
avait été écrivain, il aurait inventé lécriture de la couleur, musicien il
aurait joué une musique sculpturale sur des corps de femmes tendues comme des harpes.
Dans une autre vie il sera tout à la fois, metteur en scène de surcroît.
KAZIMIERZ DZYGA
L'HOMME
AUX
DIX MILLE REVES
PAR
CHRISTIANE LA BLANCHERIE
Si la femme est le paysage préféré du peintre, elle est avant tout
le point de départ de l'uvre. Sera-t-elle blonde ou brune, pudique ou insolente ?
Lui-même ne le sait pas encore; ce dont il est sûr, c'est qu'elle sera belle, la beauté
le fascine comme un sentiment perdu qu'il redécouvre dans chaque toile. Dans sa tête
mille et un corps aimés se mêlent, s'entrechoquent, fête des sens sens dessus dessous,
phantasme privé à l'ombre des regards. Ses modèles posent en rêve de chair et os, il
reste des parfums échevelés, des nuances sucrées, des serpentins de désirs suspendus
au septième ciel. Kazimierz, cet amant clandestin, pirate les sourires, pille les sexes,
boit aux bouches vermillon. Il engrange les soupirs d'amour, les jouissances serties de
larmes dans sa tête amarrée au quai de toutes les fantaisies. Il s'enivre jusqu'à
l'extase, elle résonne alors en notes rouges et bleues qui viennent mourir à ses mains
comme autant de vagues brunes échappées de l'océan. C'est le moment de peindre... La
minute du sortilège. Tous les sentiments superflus, il les enferme dans ses paysages, ses
décors fantastiques qui servent d'écrin à la femme enfin révélée. L'élue. C'est la
femme rencontrée au bord de la veille, avant demain et après hier, présente et
inaccessible. C'est le moment introuvable, juché en haut d'une parenthèse. Car
l'uvre de Kazimierz Dzyga s'inscrit dans l'instant. C'est sa revanche sur
l'éternité...
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